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Fable

La vieille pie

Dans la grande steppe parisienne, aux confins du périphérique, plus loin que la banlieue hachélémisée, vivait une vieille pie qui ne chantait jamais...

Elle vivait seule dans un petit pavillon oubliée de tous. Elle n'aimait rien ni personne. Sa haine la maintenait en vie et dès qu'elle pouvait nuire à quelqu'un c'était pour elle un réel bonheur. Elle menait des intrigues, lançait et entretenait les plus sales et mensongères rumeurs sur ses voisins et sur les personnalités de sa bourgade crépusculaire. Elle ne supportait pas les étrangers, les Parisiens surtout...

Elle était contre l'avortement mais pour la peine de mort ; elle crachait sur la société d'assistés mais percevait diverses pensions et allocations ; elle abhorrait le travail au noir mais faisait régulièrement effectuer chez elle de menus travaux de bricolage par un petit chômeur qu'elle réglait chichement en espèces... Elle se prétendait ouvertement d'extrême droite mais préférait, en réalité, glisser dans les urnes d'immondes messages d'insultes destinés à ses élus locaux ou au gouvernement.

Les gens de son village l'appréciaient tellement à sa juste valeur qu'ils l'avaient surnommée " la Plaie ". Sa réputation s'étendait d'ailleurs bien au delà puisque dans les bleds alentour on parlait aussi d'elle en ses termes...

La presse locale fit même un papier sur elle sans la nommer mais on la reconnaissait si bien qu'il ne se passa plus un jour sans que l'on gloussa sur son passage.

Au début elle ne comprit pas pourquoi toutes ces chiures de mouches, comme elle les appelait depuis toujours, osaient à présent se foutre ouvertement de sa méchantissime personne.

Autrefois on la craignait : personne ne se serait permis de rire d'elle ! Même les enfants n'étaient plus impressionnés par son regard mauvais... Ils lui jetaient des détritus dans son jardin et criaient " la plaie, la plaie, la plaie " en courant autour d'elle quand elle sortait avec son martinet.

Un jour, elle tomba par hasard sur l'article la concernant dans un journal défraîchi qui trainait dans la salle d'attente de son médecin. Elle comprit immédiatement que ce canard sauvage était à l'origine de sa perte de respectabilité, de son amour-sale blessé. Verte de rage, elle mourut le soir même étouffée par des litrons de bile dans d'atroces convulsions mêlées d'injures.

Comme quoi ça craint vraiment les vieux journaux chez les toubibs !
 

Laurent Potelle



 

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